Ailey

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 13 août 2021

SUCCINCTEMENT.
Alvin Ailey, interprète et chorégraphe afro-américain, a marqué le monde de la danse contemporaine. Artiste engagé, il a contribué au mouvement pour les droits civiques et pour l’égalité.

| COUP DE COEUR
de la semaine.

CRITIQUE.

★★★★ ½

texte
Élie Castiel

            Premier long métrage documentaire de Jamila Wignot, Ailey suprend par son audace, l’émotion qu’il dégage, sa texture particulière, mélange de propos éclairés d’intervenants lucides, passionnants et passionnées et d’extraits chorégraphiques aussi audacieux qu’innovateurs. Des répétitions dans les studios d’hier et d’aujourd’hui de la Alvin Ailey American Dance Theater, devenue The Ailey Studios. Quel beau sentiment de voir le caractère pérenne de l’entreprise.

De la part de la documentariste, une détermination incontrôlable, une prise en charge engagée qui consiste à situer l’expérience artistique afro-américaine non seulement dans son ADN particulier, mais à l’avenant, dans la mouvance culturelle américaine dans son ensemble.

C’est sans doute, pour Wignot, le résultat de l’expérience BLM (Black Lives Matter). Revendiquer ses droits. Créer pour exister, pour vivre décemment, pour dresser les contours du destin, pour la postérité. Mais non pas pour parler d’aujourd’hui, mais mieux encore caresser les moments inédits de l’Histoire.

Dans le cas d’Alvin Ailey, l’incontournable et célèbre danseur-chorégraphe, la proposition est d’autant plus révélatrice qu’elle s’inscrit à l’intérieur d’une autre époque, milieu du siècle dernier, ère de tous les vices raciaux, ségrégations et vicissitudes vécues au nom d’un pouvoir incriminant. Une période obscure.

Mettre lumineusement

en évidence sans tout dévoiler

Revelations, sans aucun doute le moment chorégraphique le plus lucide d’Alvin Ailey.

Et face à ces obstacles, Ailey forge sa propre destinée, contre vents et marées, évitant les pièges, se sortant avec certitude des multiples et possibles obstacles pervers. Non seulement face à l’establishment Blanc, mais tout autant à la communauté noire de l’époque qui refuse pour l’Homme un choix de vie artistique.

Double lutte identitaire, sans compter, bien entendu, celle de l’orientation sexuelle. C’est ce qui fait la force du film de Wignot. Elle parle de tous ces sujets, en fait de tous ces empêchements nocifs avec un tact hallucinant et tout aussi digne et pourtant, revendicateur. Ce mélange de propos et de documents d’archives brillamment recherchés et mis en contexte s’avèrent des pièces de conviction extraordinaires.

Ces images d’archives d’un autre moment de l’Amérique, si éloignée et que seul le cinéma peut rendre tangible, sont à la fois passionnantes et atteintes d’une étrange mélancolie malgré leur virulente et dramatique signification. C’est comme si Ailey lui-même racontait sa propre histoire.

Pour Alvin, double lutte qui traverse les époques avec une résilience qui ressemble plus à de la combativité. Car dans certains cas, cette fameuse « résilience » dont on parle souvent à notre époque, n’est-elle pas en fait une forme de faiblesse, de capitulation?

Une histoire de désir qui se crée, d’attirances qui se dévoilent, de voie à suivre selon un destin tracé, mais tout autant voilé et plus que tout, résister à son environnement. Pour Alvin, double lutte qui traverse les époques avec une résilience qui ressemble plus à de la combativité. Car dans certains cas, cette fameuse « résilience » dont on parle souvent à notre époque, n’est-elle pas en fait une forme de faiblesse, de capitulation?

Non, et c’est tant mieux, le film de Wignot ne dit pas tout sur l’artiste, même si le spectateur a la sensation d’avoir tout appris sur lui. Il reste un tas de choses à raconter, de moments à montrer, de luttes à découvrir. Mais au nom de quoi?

Et justement, Ailey, le film, s’ajuste avec preuves à l’appui à tous ces espaces bien choisis à travers les différentes décennies à l’intérieur desquelles le chorégraphe est confronté. Et dans la lutte finale, l’héritage artistique qu’il lègue ne peut être que l’ultime hommage incandescent.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Jamila Wignot

Direction photo
Naiti Gámez

Montage
Annuka Lilja

Cory Jordan Wayne

Musique
Daniel Bernard Roumain

Jamila Wignot.

Genre(s)
Documentaire biographique

Origine(s)
États-Unis

Année : 2021 – Durée : 1 h 35 min

Langue(s)
V.o. : anglais

Ailey

Dist. [ Contact ] @
Entract Films

Classement
Tous publics

En salle(s) @
Cinéma du Parc

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]