Divertimento

 

[ Moyen métrage ]

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★

Échecs

ou mat

Le franco-iranien Keyvan Sheikhalishahi, la mi-vingtaine, étonne, s’embarque dans une proposition cinématographique qui tient de la gageure. Comme un jeu d’échecs, comme si en cours de route, le tout devait se dilapider, se transformer en une déconfiture, un fiasco. Et puis, un engagement intellectuel : continuer coûte que coûte, comme si céder était de l’impuissance spirituelle et professionnelle.

À priori, il y a, côté formel, une mise en contexte brillamment réussi. Sheikhalishahi vise fort. D’entrée de jeu, il passe par la grande porte, sans demander la permission. Mais il faut comprendre que suite à un premier long métrage, Turba (2014), et deux courts, Vesper (2017) et Nox (2019), il préfère parfaire le court, disons, encore une fois, moyen métrage, pour sans doute accéder à un long abouti et bien pensé.

Différents ailleurs.

Apparemment, Divertimento traverse les festivals et reçoit un accueil chaleureux, pour ne pas dire, délirant. La mise en scène affiche la culture cinématographique du très jeune cinéaste. C’est le cinéma occidental (mais pas seulement) qui l’anime, le recherché, ses codes, ses diverses époques, mais en quelque sorte, un cinéma intemporel qui ne compte pas les décennies.

Le château de Champlatreux, quelque part en région parisienne, où a été tourné le film, n’évoque-t-il pas un certaine Année dernière à Marienbad  d’un certain Alain Resnais, ou autre œuvre moderne, de Nolan, par exemple. Ici, un endroit silencieux où malgré l’avalanche de dialogues dans le film, demeure indubitablement un non-lieu.

Peu importe la trame narrative même s’il est question de pouvoir, de manipulation, de fausses reconstitutions, d’imaginaire et de réalité, ce qui compte, pour notre plaisir, c’est bel et bien l’esthétique du film. Sa brillance dans la composition des images, l’évocation d’un cinéma de qualité qui s’adresse à un spectateur qui réfléchit et participe intellectuellement aux images en mouvement qui défilent à l’écran.

Pour Keyvan Sheikhalishahi, le médium cinéma est également un jeu d’échecs. Il faut savoir bien jouer et surtout le « regarder » et le « comprendre ». Rien que cela.

Il tourne en anglais, et ce n’est pas par hasard. C’est bien la langue où tout peut se vendre et se « faire montrer ». Stratégie de mise en marché de sa part, en accord avec une nouvelle génération de faiseurs d’images qui veulent, ou tentent de s’occuper de toutes les étapes de production d’un film. L’échec n’est pas un possibilité.

Distribution internationale en ce qui a trait au casting. Et pourquoi pas. Ouverture au monde. N’est-ce pas là la nouvelle norme. Tout en soulignant que le casting est magnifiquement bien choisi. Toutes et tous participant à ce jeu d’échec, dont chacun des pions tient lieu de personnages.

Pour Keyvan Sheikhalishahi, le médium cinéma est également un jeu d’échecs. Il faut savoir bien jouer et surtout le « regarder » et le « comprendre ». Rien que cela.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Keyvan Sheikhalishahi

Scénario
Keyvan Sheikhalishahi
Direction photo
Jean-Claude Aumont
Musique
Gréco Casadesus
Gregory Cotti
Interprètes
Kellan Lutz, Torrey DeVitto
Ola Rapace, Götz Otto
Christian Hillborg, Ellie Heydon

Keyvan Sheikhalishahi.
Tourner, c’est ce qui compte le plus.

Genre
Drame
Origine

France
Année : 2020 – Durée : 30 min
Langue
V.o. : anglais, s.-t.f.
Divertimento

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Classement (suggéré)
Tout public
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

 

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]