Julien Rambaldi

ENTREVUE.
[ Cinéma ]

Proposée par Élie Castiel

Julien Rambaldi signe un troisièe long métrage sans prétention, s’en donnant à cœur joie, passant d’un état d’esprit à l’autre, virevoltant les situations comme bon lui semble, librement, ludiquement, pris par un excès de roublardise contrôlée, teintée de bonnes intentions et de situations honorables. Il dirige ses comédiennes surtout et ses comédiens comme si, du coup, l’univers qu’il crée devient, le temps du tournage, le centre du monde, alors qu’il s’attend à ce qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes. Rencontre en six questions.

Julien Rambaldi (tuque rouge).
Multiplier les lieux de tournage.

En fait, le sujet, les affres de l’accouchement, n’est pas nouveau.
Effectivement, mais c’est pourquoi j’ai voulu y apporter une touche inusitée par le truchement du film choral. Un film assez libre, assez fou sur un sujet qui est assez universel. En fait, j’avais en tête un film de Richard Curtis, Love Actually (au Québec, Réellement l’amour). Fabriquer un film choral sur cet évènement particulier, c’est tout de même assez inspirant.

Les sage-femmes, le milieu hospitalier, tout cet univers semble provoquer en vous une certaine admiration.
Effectivement. Il y avait là matière à réflexion. je me suis attaché à illustrer le contexte difficile dans lequel se trouve souvent ce milieu particulier, mais sans trop encombrer le message.

Les femmes enceintes dont il est question proviennent de diverses classes sociales, mais toutes issues d’un milieu urbain.
C’est le monde dans lequel on vit aujourd’hui. Le film est en fait une photographie des femmes et des hommes qui les accompagnent. Le contraire d’il y a deux ou trois décennies où ces messieurs attendaient angoissés la minute de l’accouchement, en fumant une cigarette. J’ai voulu montrer le lien participatif entre les deux parties d’un couple. Les comportements masculins sont très différents de ceux qu’on avait l’habitude de voir dans d’autres générations.

« Somme toute, Josiane Balasko est

la marraine de toutes ces femmes. »

Ces femmes dont il est question sont, dans la vie de tous les jours, des personnes actives.
Effectivement, c’est ce que je voulais montrer; des femmes profondément actives, comme c’est le cas, par exemple, de Manon, personnage incarné par Léa Drucker, cheffe d’entreprise qui ne recule devant rien pour poursuivre son travail.

Bel exemple parmi toutes ces femmes. Intéressant de constater l’interaction qui s’établit dans la conférence virtuelle entre l’une d’elles et le conseil d’administration et les représentants à Qatar. Malgré le sérieux de la situation, que le film pousse comiquement à l’extrême, vous établissez, consciemment ou pas, une sorte de « business must go on » catégorique qui change la donne.
Très juste, mais il fallait rendre le moment quasi loufoque, sans quoi le propos friserait la totale invraisemblance.

Et parmi ces couples, majoritairement hétérosexuels, un couple lesbien.
Je crois qu’il était important d’ajouter cet élément relatif à la diversité sexuelle, lui donner droit de cité; par extension, droit de « procréation ». Si la gestation se passe par « voie naturelle », n’empêche que ce choix narratif permet la réaction du géniteur dans cette histoire. À chacun des spectateurs d’exprimer ses propres convictions. Même si au fond, l’homme essaie de s’imposer à nouveau, utilisant toutes les pistes de la soi-disant séduction pour convaincre la principale concernée du bien fondé d’une possible relation, soit au détriment de la conjointe de celle-ci. C’est comme s’il s’agissait d’un territoire qu’il tente de reconquérir.

Nicolas Maury assume son rôle. Est-ce que ce choix est délibéré?
Excellent comédien, très sensible, polyvalent. Il partage avec Josiane Balasko ce côté dramatique, essentiel au film. En fait, je ne voulais pas utiliser des acteurs comiques, mais des comédiens ambivalents, allant d’un état d’esprit à l’autre. Et Maury fait partie de cette catégorie.

Bien entendu, Josiane Balasko demeure l’épine dorsale du film, sans quoi on ne peut passer d’une histoire à l’autre avec autant d’harmonie.
Ce film là est une sorte de cocktail à tout ce qu’elle a pu tourner auparavant. Entre le rire et le conséquent, entre le drame et l’affectation. Balasko touche à toutes les formes dans l’art d’interprétation, mais plus que tout, s’ajuste aux différents cadres narrativement complexes. On peut compter sur elle et particulièrement sur les rapports professionnels qu’elle partage avec les comédiens et les autres membres de l’équipe. En fait, son personnage est le relais entre une histoire et l’autre, un point de transition équilibré. Elle symbolise vraiment la maternité dans son esprit le plus humainement combatif. Somme toute, Josiane Balasko est la marraine de toutes ces femmes.

[ CRITIQUE du film ici. ]