L’envol

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 16 juin 2023

SUCCINCTEMENT.
Quelque part dans le Nord de la France, Juliette grandit seule avec son père, Raphaël, un soldat rescapé de la Première Guerre mondiale. La jeune fille fait un été la rencontre d’une magicienne qui lui promet un riche avenir.

CRITIQUE

★★★ ½

texte
Élie Castiel

 

Un début dramatiquement nostalgique, en forme d’actualités des premières images du cinématographe; des soldats, des revenants de la Première grande guerre d’un 20e siècle qui s’annonce rugissant.  Silence que seule la pellicule en grain rend saisissant, irrévocable, transperçant.

 

Le destin

de Juliette

 

Le silence est de mise au cours des prochaines minutes. On apprendra, peu à peu, à connaître ce soldat au physique « phénoménale », imposant; au visage ravagé mais d’une beauté sauvage qui cache mal vulnérabilité, raffinement rural et humanisme.

Très librement inspiré par le Russe Alexandre Grine et son roman Les voies écarlates, écrit en 1923, le transalpin Pietro Marcello construit un film dont le romantisme lyrique s’empare de plusieurs genres cinématographiques : le film romantique, la fable humaniste, le film vaguement musical et ce on ne parle que peu par les temps qui courent, la trajectoire du destin.

Un rapport père-fille fait de silences résonnants.

Un lieu unique, rural, où rien ne semble se passer, sauf la vie, les hommes, les femmes, les bêtes, le travail et le temps. Et pourtant, des secrets, des choses non dites, des « princes charmants » qui passent par-là, par hasard – ou peut-être que non, car poussé sans doute par l’unique sorcière, pardon, magicienne des lieux (inépuisable Yolande Moreau). Et elle, Juliette, qu’on verra grandir, orpheline de mère, proche de son père, revenant du conflit 14-18. Il pratiquera le métier qu’il professe le plus, celui de travailler le bois, la sculpture – surtout celle qu’il consacrera à sa femme.

Si l’auteur du très beau Martin Eden succombe encore une fois à la tentation de conjuguer le corps à la nature, particulièrement celui de Juliette, lorsque devenue jeune femme, il le fait avec la grâce d’un peintre face à sa muse bien-aimée, naviguant entre le désir du corps féminin et sa représentation mythique. Marcello est en quelque sorte un cinéaste culturellement engagé. Il oscille entre le filmé social et la place que le physique prend dans ce parcours. Non seulement  dans le cas de Juliette, mais aussi en ce qui a trait aux personnes qui l’entourent, aspergées de ce parfum de vie qui garde nos sens en éveil.

Des séquences fortes, d’autres intentionnellement maladroites, comme si pris, comme on dit, par « le feu de l’action » ou des épreuves, Pietro Marcelle se laissait guider uniquement par cette étrange histoire d’amour où rêve et réalité se confondent pour refaire la vie.

Qu’il s’agisse de ceux de Mme Adeline (excellente Noémie Lvovsky, dans un rôle à contre-emploi qu’elle arrive parfaitement à soutenir), et bien entendu, notre Juliette (dans un premier rôle au grand écran brillamment tenu de grandes promesses). Elle fait des poses, affiche des regards magnifiquement cinégénique, chante à merveille des refrains de sirène et aime comme on respire.

Réfugié des films dits d’auteur, Louis Garrel semble se diriger vers une carrière, toujours d’acteur, beaucoup plus plurielle, accueillant les genres divers avec une réluctance insoupçonnée.
Finalement, Raphaël, comme Juliette, conservant le même prénom d’acteur, Raphaël Thiery, l’une des grandes surprises de ce film étonnant, lyrique, sans concessions quant à l’approche cinématographique. Thiéry bouscule l’art d’interprétation, justement par son absence presque totale de connivence avec le r Justement, il est dans plus de 30 films, mais il est de ces comédiens qui ne font pas beaucoup de bruit; en fait qui ne font pas du tout du bruit. Un film qui le place, sans son accord sans doute, dans lun piédestal. Un acteur qui nous surprend par son charme et sa persévérance antistar, antisystème.

Des séquences fortes, d’autres intentionnellement maladroites, comme si pris, comme on dit, par « le feu de l’action » ou des épreuves, Pietro Marcelle se laissait guider uniquement par cette étrange histoire d’amour où rêve et réalité se confondent pour refaire la vie.

Tout est forgé selon ce que sera le destin de Juliette.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Pietro Marcello

Scénario
Pietro Marcello, Maurizio Braucci, Maud Ameline.
Avec la collaboration de Grenevève Brissac.

D’après la nouvelle Les voiles écarlates, d’Alexandre Grin,
Direction photo
Marco Graziaplena

Montage
Carole La Page
Andrea Magudo
Musique
Gabriel Yared

Pietro Marcello.
Poétiser le réel.

Genre
Drame

Origine
Italie
France
Allemagne
Année : 2022 – Durée : 1 h 40 min
Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

Scarlet

Dist. [ Contact ] @
[ Kino Lorber ]

Diffusion @
Cinéma du Musée

Classement (suggéré)
Visa GÉNÉRAL
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]