The Goddess of Fortune

PRIMEUR
Sortie
Mardi 17 novembre 2020

SUCCINCTEMENT
Depuis 15 années, Arturo et Alessandro vivent le parfait amour aves ses hauts et ses bas. Jusqu’au jour où Annamaria, une amie proche, leur laisse temporairement ses enfants en garde,  dû à des raisons d’ordre médical. Leur quotidien se voit ainsi bouleversé.

CRITIQUE.

texte
Élie Castiel

★★★ ½

Mœurs et culture obligent, nul doute que le turco-italien (né en Turquie) n’aurait pas pu suivre sa carrière dans son pays natal. Son œuvre d’une quarantaine de films aborde régulièrement le thème de l’homosexualité, une constante s’inscrivant à l’intérieur de la majorité hétéronormative, en principe, ouverte à la diversité. Mais Ferzan Ozpetek assume son côté bourgeois et ses personnages sont la plupart du temps issus de ce milieu, partagent des professions libérales, sont rentiers ou encore exercent des métiers professionnels, à l’aise économiquement et traversent, «  cinéma-oblige » des crises existentielles de tout ordre.

Et l’érotisme, ces images que le spectateurs attendent parfois en voyeurs, il les illustre avec une subtilité à fleur de peau. On pense souvent à Visconti, non guère à Pasolini, lui, beaucoup plus rebelle. En fait, Ferzan Ozpetek est un self-made-man qui a construit son propre cinéma en tentant sa chance dans un pays plus libre, même si au fond, l’Italie, comme tous les pays du monde, n’est pas dépourvue de ressentiments homophobes.

Le charme (in)discret

d’une certaine bourgeoisie

Mais ce qui est le plus surprenant, et c’est la marque « de commerce » d’Ozpetek, c’est qu’il réunit souvent les mêmes acteurs, une sorte de ménagerie (au sens positif) qu’il s’est construite, question que ses scénarios, ses idées, sa mise en scène s’inscrivent dans une sorte de continuité narrative et, par défaut, esthétique.

C’est ce qu’on constate une fois de plus dans The Goddess of Fortune / La dea fortuna; les personnages, nous les avons recontrés précédemment dans d’autres réalisations, ou du moins il nous semble. Car dans le cas de ce cinéaste humaniste, on a l’impression que toute son œuvre est un « travail en ébauche » (work in progress, comme on a pris l’habitude de dire).

Ce n’est sans doute pas là le Meilleur Ozpetek, mais force est de souligner que nous retrouvons, chez tous les protagonistes cette angoisse devant l’amour, les décisions à prendre, les responsabilités face à soi-même et aux êtres chers, le désir d’aimer et de partager, et ultiment, une affinité affective qu’on a perdu depuis quelque temps de vue.

Le cinéma homosexuel de Ferzan Ozpetek n’est pas celui de la revendication, du militantisme, de la révolte ou d’une quelconque prise idéologique, mais au contraire, celui d’une assimilation à la société globale. Les personnages gais le sont pas défaut. Sans excuses, sans jugement. La vie et rien d’autre.

Et un détail dont peu (ou pas) de critiques parlent, la présence dans presque tous ses films de la comédienne turque Serra Yilmaz (ici, Esra), une gueule, une présence, un charisme extraordinaire. Elle se mêle de tout et de rien. Fag hag extraordinaire (prononcez en anglais) et dans le même temps celle par qui la tempête se calme. Un mélange de tempérament farouche mêlé à de la compréhension. Individuellement, elle profite du temps présent et par la même occasion affiche subtilement un visage mélancolique devant les années qui passent. Ça s’appelle de la maturité.

Il ne s’agit pas ici d’une étude de texte. Il faut découvrir le film avec toutes ses faiblesses, ses grandeurs et un cinéaste qui refuse de parler politique, en liberté et confortable dans un milieu qu’il connaît à merveille. Le cinéma homosexuel de Ferzan Ozpetek n’est pas celui de la revendication, du militantisme, de la révolte ou d’une quelconque prise idéologique, mais au contraire, celui d’une assimilation à la société globale. Les personnages gais le sont pas défaut. Sans excuses, sans jugement. La vie et rien d’autre.

La première séquence, qui paraîtra aux yeux de certains, tirée par les cheveux, vaut à elle seule le déplacement. La diversité sexuelle n’aura jamais parue aussi reconnue dans un film de fiction. Et comment ne pas souligner la présence charismatique de Stefano Accorsi, Edoardo Leo et Jasmina Trinca, tous les trois au diapason de leurs personnages.

Quant à la «déesse » du titre, elle paraît nous échapper même si une explication évasive nous est donnée lors d’une visite touristique fort intéressante. Sensuellement tendre.

AVIS : The Goddess of Fortune est également présenté (En ligne) dans le cadre de I+N 2020 (voir ici.)

 

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Ferzan Ozpetek

Scénario
Ferzan Ozpetek

Silvia Rangagni
Gianni Romoli

Images
Gian Filippo Corticelli

Montage
Pietro Morana

Genre(s)
Drame

Origine(s)
Italie

Année : 2019 – Durée : 1 h 54 min

Langue(s)
V.o. : italien; s.-t.a.

La dea fortuna

Dist. @
[ Breaking Glass Pictures, États-Unis ]

Classement (suggéré)
Interdit aux moins de 13 ans

Diffusion
DVD & VSD
@ Amazon, iTunes, Google Play, Vudu, Fandango et InDemand

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]