The Lost Daughter

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 17 décembre 2021

SUCCINCTEMENT.
Lors de vacances à la mer en solitaire, Leda est fascinée par une jeune mère et sa fille qu’elle observe sur la plage. Bouleversée par leur relation fusionnelle, elle est submergée par la terreur, la confusion et l’intensité de ses souvenirs de maternité précoce.

CRITIQUE.

★★★★

texte
Élie Castiel

Un premier long métrage de fiction pour Maggie Gyllenhaal, plus de quarante productions en tant que comédienne à son actif ; elle signe ici une brillante proposition à partir d’une grande figure de la littérature italienne au romantisme allégorique. Bien plus que ça, cette écriture où règnent les contours d’individus tourmentés par leurs actions parfois extrêmes. Ici, l’abandon d’une mère pour ses deux jeunes filles, afin de pouvoir remplir la promesse qu’elle s’était faite de réussir une carrière de femme de lettres.

  Leda, 48 ans, venue se ressourcer seule, dans une île grecque, se souvient de son parcours à la suite d’un incident quelconque, impliquant la poupée de la fille d’un couple et d’autres personnes venues troubler sa paix avec leurs cris. Des Grecs de Boston et quelques locaux.

 Rien de bien compliqué dans l’écriture de Ferrante ou celui de l’adaptation de Gyllenhaal, sauf pour cette soudaine envie d’europanéité qui rapproche la cinéaste au rang des auteur(es) dramatiques, cette tendance à présenter les individus dans leurs quotidiens les plus contradictoires.

  Et un tournage sur une île grecque, loin de ces faux lieux de villégiature remplis d’étrangers d’autres cultures qui se fichent de tout. Dans ce Lost Daughter,  Leda, seule vraie étrangère ; ses voisins, ses voisines, d’anciens locataires du pays, comme tous les méditerranéens qui s’expriment en criant, qui sont parfois méchants sont vraiment l’être, sans doute une sorte de petite revanche face à une Europe qui les a sans doute vus différemment ou, encore, quelque chose comme d’un héritage venu des 400 ans d’occupation ottomane.

Marée basse

sur mère agitée

La troublante allégorie du double.

  Gyllenhaal a adroitement compris cet aspect délicat de l’interaction entre les personnages et ce n’est pas par hasard si Olivia Colman occupe l’un de ses plus beaux rôles. Fréquemment filmée en gros plan par l’œil indiscret de la caméra d’Hélène Louvart – du magnifique La vida invisível / La vie invisible d’Euridíce Gusmão – comme si se rapprocher le plus près d’elle cachait ce qu’elle voudrait que les autres ne voient pas. Et puis, des rencontres fortuites qui lui font avouer à demi-teintes d’abord, qu’elle n’a pas été une bonne mère.

La mise en perspective de la cinéaste, d’une extraordinaire maturité, s’enivre de ce mélange de plans rapprochés et de moyens, deux forces dans tout tournage, ces binarités de l’existence impossibles à camoufler. 

Cette adaptation d’un écrit de Ferrante demeure une des plus subtiles propositions de l’année.

  On ne dira rien de plus sur l’intrigue puisque The Lost Daughter est un film d’auteure (autrice, comme on dit dans certains cercles aujourd’hui – et dont je n’arrive pas à m’habituer) qui, de par sa nature, privilégie les personnages tourmentés plutôt que les petites gens pour la simple raison que dans le travail d’écriture, on comprend leurs souffrances, leurs contraintes, leurs ambigüités face à la vie et, aussi, d’un point de vue général, parce qu’ils sont plus intéressants que les gens qui n’ont rien à dire.

  La mise en perspective de la cinéaste, d’une extraordinaire maturité, s’enivre de ce mélange de plans rapprochés et de moyens, deux forces dans tout tournage, ces binarités de l’existence impossibles à camoufler.

  Cette adaptation d’un écrit de Ferrante demeure une des plus subtiles propositions de l’année. Les journées de pluie, celles où le soleil se fait discret, pudique, mais brillant quand même. Sans doute, un destin des Dieux. Cet amalgame des contradictions de la nature qui s’entrecroisent et qui, lors des moments de souvenirs, illustrés par des retours en arrière sublimes, donne raison à Maggie Gyllenhaal, celle d’avoir atteint un degré de quasi-perfection dans ce premier essai brillant. Et ne comparons pas son travail à celui d’autres cinéastes. Laissons-lui les grands honneurs.

  Un autre coup de maître de Netflix. Les temps changent.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation

Maggie Gyllenhaal

Scénario
Maggie Gyllenhaal

D’après le roman de Elena Ferrante

Direction photo
Hélène Louvart

Montage
Alfonso Gonçalves

Musique
Dickon Hinchliffe

Maggie Gyllenhaal, debout.

Genre(s)
Drame

Origine(s)
États-Unis
Grèce

Année : 2021 – Durée : 2 h 01 min

Langue(s)
V.o. : anglais, grec; s.-t.a.

I chaméni Kóri

Dist. [ Contact ] @
Netflix
[ Équinoxe Films ]

Classement suggéré
Visa GÉNÉRAL
[ Déconseillé aux jeunes enfants ]

Diffusion @
Cinéma du Musée
Dollar Cinéma

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]