? Interdit de reproduire les accents ?

TRIBUNE LIBRE.

texte
Sylvio Le Blanc

Les « wokes » « chokent »

J’apprends qu’à la demande des studios de cinéma, pour contenter les « wokes » (éveillés), les acteurs québécois sont priés de ne plus reproduire les accents dans le doublage de leurs films, même si, dans les versions originales, ils sont nettement perceptibles. Ce qui a fait dire à mon interlocuteur : « Si Jackie Chan fait à nouveau un film, il risque de sonner normatif [une fois doublé]. »

Voilà où nous en sommes avec ces militants extrémistes. Le doublage des accents serait donc assimilé par ces soi-disant « éveillés » aux oreilles délicates à une forme de racisme. Pour eux, un personnage de migrant mexicain serait infériorisé dès lors que son accent espagnol est reconnu. L’acteur interprétant un yakuza au lourd accent ferait mal paraître les Japonais. Mais qu’en est-il du respect de l’œuvre originale.

L’idéologie « woke », c’est aussi une question d’accents.

La prochaine étape consistera vraisemblablement à tourner directement les versions originales dans une langue javellisée, avec des acteurs jouant des personnages nés à l’étranger, mais s’exprimant (in English, of course) sans accent. De sorte qu’un djihadiste ayant grandi en Arabie saoudite parlera comme Tom Cruise ou Tom Courtenay. Nous obtiendrons au final ce que réclament les « wokes » au cinéma – au pouvoir ludo-éducatif indéniable sur les masses –, à savoir un monde certes de carton-pâte, mais sans aspérités.

Mais le meilleur reste à venir. Comme nous avons réussi à coloriser les vieux films noir et blanc, il n’est pas impensable que d’ici quelques années nous obtenions à la carte des versions dans lesquelles les personnages deviennent au choix leucodermes, mélanodermes, xanthodermes ou encore métissés. Vous tenez à un Othello blanc, un Macbeth noir, un Hamlet mat et sans accent? À la bonne heure! Chacun y trouvera son compte avec cette nouvelle peinture à numéros et vivra dans sa sphère. Un monde multiculturaliste idéal, en somme.