Jean-Luc Godard.
1930-2022

Jean-Luc Godard

Au total, 131 réalisations, toutes expérimentations, durées et modes d’expression confondu(es). Un cinéma des modernités, pour certains, « de la modernité » puisqu’avec À bout de souffle, les codes de la narration bouleversent le cinéma, non seulement français, mais universel. On a tant publié sur lui qu’un hommage pourrait paraître superflu. On l’a tant enseigné que sa mort peut-être vue comme un voyage au loin, sans retour, mais son idée du cinéma si présente dans cette mémoire cinématographique qui croit encore qu’il s’agit d’un Art.

HOMMAGE.
texte
Élie Castiel

Un

cinéma

des

altérités

Même sa mort a été orchestrée. La Suisse lui permet le « suicide », comme pour en finir avec ces incessantes pathologies. Audace de l’Homme, mais également, à bien y penser, une sorte de mise en scène, une mise en abyme entre sa propre finitude et son parcours prodigieux.

Force est de souligner que Adieu au langage (2014) est une sorte de mort annoncée, les quelques bribes qui suivront ne seront qu’alimentaires à son esprit imaginatif. Il reste tout à fait conscient que bientôt, ce sera fini.

Brigitte Bardot.
Le mépris

Certes, plusieurs périodes-Godard, dont celle des années 60, me semble la plus intéressante. Sans trop de pressions sur les modes narratifs, il invente toutefois des façons de raconter; il tourne en extérieur, la rue, Paris le jour et la nuit, les intérieurs de ces minuscules appartements où Belmondo et Seberg s’adonnent à leur aventure sentimental tout en refaisant le monde (et le cinéma).

Jean-Paul Belmondo, Jean Seberg.
À bout de souffle

Nous éviterons les listes interminables. Les périodes qui suivent les années 60 marquent un cinéma des altérités des discours et des rapports formels. Expérimenter avec le cinéma comme appui à un monde qui ne se comprend plus. Dans son esprit, est-ce la fin du discours intellectuel? L’hégémonie de la pensée unique? Il se radicalise aux yeux de certains, mais peut rejoindre ses partisans de longue et « nouvelle » dates.

Anna Karina
Vivre sa vie

Pour le souvenir : bien entendu, Bébel et Seberg. Anna Karina pour Vivre sa vie et, personnellement, la Bardot du Mépris, dont il n’en voulait pas, mais qu’il a réussi à rendre, grâce à des procédés techniques, notamment en ce qui a trait à la couleur et à la lumière, resplendissante, d’une modernité hallucinante et quasi éternelle dans sa féminité. Non pas féministe, pas le moins du monde, mais libre face à sa physicalité et à sa sexualité.

Même si son cinéma des deux dernières décennies m’a semblé barbant, une profond désir de continuer à expérimenter, un immense respect envers cet incontournable mode d’expression. Godard, le récalcitrant intempestif des normes et codes cinématographiques bien ordonné(es). Une vision du monde et de sa profession uniques. Son temps lui appartient.