Le malade imaginaire

CRITIQUE

  < SCÈNE >  

Élie Castiel

★★★ ½

Dernière pièce de Molière, Le malade imaginaire conclut une vie d’écritures où par le rire, l’incontournable auteur continue d’illustrer la société de son temps, ses mœurs, ses comportements, ses veuleries. Dans ce plan final, Argan assis dans son fauteuil de « souffrant » au milieu de la scène, face aux spectateurs, n’est-il pas, après tout l’alter ego du créateur lui-même. D’une certaine façon, annonçant sa mort prochaine.

Crédit photo @ Jean-François Hamelin

Entre le délire du spectacle et la vraie vie, des parallèles étranges qui nous rappellent avec résignation, presque soumission, les préceptes incontournables de la condition humaine. C’est aussi cela, Molière.

Michel Monty, après le brillant Le misanthrope au TRV, que nous avions beaucoup apprécié lorsque je signais à Séquences (voir ici.) persiste et signe un autre de ses auteurs préférés. Mais peut-être avec passablement moins d’ardeur. Les brèves joutes à saveur scatologiques auraient pu être évitées ou « démontrées » avec moins de ferveur – Avouons tout de même que l’auditoire semblait bien apprécier ces moments loin d’être galants. Mais bon, c’est dans l’air du temps par les temps qui courent – les humoristes du monde entier en raffolent et ça fait courir les foules.

Tous les coups sont permis

Intéressante ou pas cette scénographie qui mélange les époques? On s’en remet après quelques minutes, portant plus d’attention à la juxtaposition texte/interprétation. Il faut avouer que Le malade imaginaire est une pièce préférablement à voir en matinée. Elle ravive l’esprit, accommode notre perception du monde et des individus et, sans qu’on s’y rende compte, nous offre des messages d’autrefois, aujourd’hui en désuète.

Tous et toutes s’expriment en français universel et, bizarrement, Béline, seconde femme d’Argan, femme ambitieuse qui ne rêve que d’héritage, prend des accents légèrement québécois sous les traits d’Émilie Lajoie, magnifique comédienne – décision cependant qui rompt avec le reste de la distribution.

Ce que le théâtre de partout dans le monde doit faire, et pas seulement au Québec qui, soit dit en passant, demeure, en termes de francophonie, le plus passionnant du monde, ce n’est pas d’essayer de plaire à tout le monde, mais au contraire de véhiculer une vision personnelle de notre société et des individus, quitte à ce que certains spectateurs n’y adhèrent pas.

Donnons à Michel Monty la bonne note qu’il mérite. Mise en scène souple, rythmée, sans temps morts, utilisant l’espace dramatique avec élan, faisant en sorte que les répliques tiennent de la joute menée tambours battant, et tous en sortent gagnants. Et c’est bien ainsi.

… politique oblige, la diversité brille par sa présence. C’est donc à un Malade imaginaire réinventé qu’on assiste, grâce à un contenu, d’une drôlerie intemporelle qui ne cesse de gagner notre adhésion.

Chauveau, Coquereau, Guérin, Lajoie et les autres Lucien, Mauffette, Mompérousse et Tremblay s’en tirent avec tous les honneurs et adorent la scène. Et politique oblige, la diversité brille par sa présence. C’est donc à un Malade imaginaire réinventé qu’on assiste, grâce à un contenu, d’une drôlerie intemporelle qui ne cesse de gagner notre adhésion.

ÉQUIPE PARTIELLE DE CRÉATION
Texte
Molière
Mise en scène
Michel Monty
Assistance à la mise en scène
Élaine Normandeau
Décors
Guillaume Lord
Costumes
Marc Senécal
Éclairages
Étienne Boucher
Musique
Bruno Rouyère
Également musicien, accompagné de Matthias Soly-Letarte
Distribution
Anne-Marie Binette, Violette Chauveau
Patrice Coquereau, Luc Guérin
Émilie Lapointe, Didier Lucien
Benoit Mauffette, Maxime Mompérousse
Frédérick Tremblay

Production
Théâtre du Rideau Vert
Durée
1 h 30 min
[ Sans entracte ]
Représentations @
TRV
Jusqu’au 29 février 2020

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon. ★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]