Les chambres rouges

P R I M E U R
[ En salle ]
Sortie
Vendredi 11 août 2023

RÉSUMÉ SUCCINCT.
Deux jeunes femmes se réveillent chaque matin aux portes du palais de justice pour pouvoir assister au procès hypermédiatisé d’un tueur en série qui les obsède, et qui a filmé la mise à mort de ses victimes. Cette obsession maladive les conduira dans les recoins les plus sordides du Dark Web, là où les vidéos de meurtres se vendent aux enchères.

 

Le FILM
de la semaine

CRITIQUE
Élie Castiel

★★★★

 

Il y a, dans le troisième long métrage de Pascal Plante, après Les faux tatouages (2017) et surtout Nadia, Butterfly, que nous avions vraiment apprécié, quelque chose de translucide, d’imperméable, d’indicible, tant les personnages, les lieux aussi (sauf, comme il se doit, dans la salle du Palais de justice où se déroule le procès).

 

Forces

majeures

 

Ce choix esthétique se manifeste particulièrement dans l’appartement haut de gamme d’un gratte-ciel au centre-ville de Montréal à la vue surprenante, mais souvent plongé dans la pénombre. On peut le comprendre puisque la principale intéressée, véritable pro du dark web et joueuse compulsive au poker en ligne passe ses nuits dans une solitude réinventée.

Kelly-Anne (excellente Juliette Gariépy, changeant de registre avec une aisance consommée) est mannequin, dans la trentaine, et on peut comprendre son style de vie, bien que… Une rencontre avec Clémentine (Laurie Babin-Fortin, déjà excellente dans La petite fillle qui aimait trop les allumettes, campe son rôle aussi ludiquement que, soudain, s’esquivant dans une sorte de ressac psychologique qui la bouleverse) suscite quelques changements de cap chez les deux protagonistes. Un lien fusionnel et sans doute malsain, bien qu’assumé, s’établit entre les deux jeunes femmes.

Mais Les chambres rouges est surtout un film d’atmosphères, de lieux de perdition, de ces espaces qui réorientent la réalité et la transforment en un microcosme, même si provisoire, un terrain combatif entre l’individu et son for intérieur, ses sentiments (s’ils existent, du moins pour Kelly-Anne).

Un anonymat des plus inapparents.

Ces débordements, même si montrés un brin cliniques, glacials, s’avèrent d’autant plus insupportables. C’est ce que le film de Plante arrive à suggérer plutôt que de montrer. Habile conteur, intellectuel (dans le bon sens du terme), épris de nouvelles formes esthétiques, il assure la continuité horizontale du récit sans se soucier du reste.

Dominique Plante, le maître de musique, assure une bande-sonore formidable, très présente, mais cette fois-ci, utile au déroulement du récit. Et bien entendu, une sorte de chorégraphie du mouvement dans la direction photo de Vincent Biron, soutenue, et du coup, montrant une agilité où le suspense s’octroie droit de cité. À la lueur resplendissante au procès, correspond une obscurité, autant dans la grisaille d’un centre-ville de Montréal, parfaitement filmée, et dans un appartement-complice où se déroule des tractations illicites. Le ratio-écran 1.33 :3 n’est pas un simple caprice de créateur, mais un choix qui s’adapte à l’enfermement de l’ensemble. Dans la langue, notamment au Palais de justice, un français normatif qui devrait pousser les doubleurs québécois des films étrangers à revoir certaines règles.

Un film surprenant, parmi les plus excitants de cette saison cinématographique.

Tout compte fait, un film élégant, intrigant, où divers genres sont permis (drame judiciaire, psychologique…). Et dans tout cet attirail d’idées bien établies, se profile un nouveau cinéma québécois qui semble en finir avec les essais nombrilistes de ces dernières années.

Quant au dark web, ce lieu impénétrable pour le commun des mortels, on y découvre le nombre incroyable d’adeptes qui y adhèrent. Des individus comme vous et moi. Les effets néfastes de la technologie n’ont jamais été aussi passés au crible.

Un film surprenant, parmi les plus excitants de cette saison cinématographique.

FICHE TECHNIQUE PARTIELLE
Réalisation
Pascal Plante

Scénario
Pascal Plante
Direction photo
Vincent Biron

Montage
Jonah Malak
Musique
Dominique Plante

Pascal Plante

Genre
Suspense psychologique

Origine
Canada [Qc]
Année : 2023 – Durée : 1 h 58 min
Langue(s)
V.o. : français; s.-t.a.

Red Rooms

Dist. [ Contact ] @
Entract Films
[ H264 ]

Diffusion @
Cinéma Beaubien
 Cinéma du Parc
 Cineplex

 

Classement
Interdit aux moins de 13 ans

ÉTOILES FILANTES
★★★★★ Exceptionnel. ★★★★ Très Bon.★★★ Bon.
★★ Moyen. Mauvais. 0 Nul.
½ [ Entre-deux-cotes ]