Souviens-toi des Choses de la vie

RECENSION.
[ Cinéma ]

★ ★ ★ ★

au

fil

du

temps

texte
Élie Castiel   

Un beau livre, élégant comme le cinéma de Claude Sautet, essentiellement à partir de son meilleur film, Les choses de la vie. Un ouvrage de l’auteur-critique Arnaud Corbic dont les illustrations sont des captations de quelques scènes clé du film, ces séquences qui passent rapidement, comme des éclairs, mais qui revues plusieurs fois au ralenti sur un moniteur d’ordinateur ou un écran de télévision, demeurent hantées dans notre mémoire. Les détails s’enlisent dans le cerveau.

L’accident de voiture, celle-ci prenant feu, image trop prenante, le corps de la victime poussé au loin, comme une banalité féroce de la vie. Cette tragédie sur fond de générique. Le film de Sautet convoque déjà la détresse humaine, cet inévitable rapport à la mort.

Dans cet essai, si on peut l’appeler ainsi, Corbic met minutieusement en perspective, plan par plan, les détails de ce que nous avons vu en quelques secondes, de brèves minutes. Entres les images qui l’accompagne et le texte, un rapport complice, incestueux, une volonté non pas de séduire ou d’affecter le lecteur en insistant, mais de le mettre en position auxiliaire avec le cinéma, cet art du vivant, du mouvement, des sensations, qui imitent la vie en la transcendant, parfois trop proche d’elle.

Oui, il y a un réalisateur, Claude Sautet, que l’auteur de ce beau travail « d’enquête » admire, soutient sa thématique, reconnaît en lui une des forces majeures du cinéma hexagonal des trente glorieuses, celle des années 70. Le cinéma français, on doit l’admettre, était typiquement français. Et c’était là sa force. Une pléiade de vedettes, comme Romy Schneider, Michel Piccoli et les autres. Bien sûr, dans le pré-casting on a pensé à d’autres pour incarner les rôles de Pierre Bérard et Hélène. La coproduction entre la Suisse, la France et l’Italie exige-t-elle la présence de Léa Massari, Catherine la femme de Pierre. Une présence essentielle pour bien saisir les contours de cette merveilleuse histoire d’amour.

Corbic, avec tous ses menus détails reconnaît que Les choses de la vie est un grand film d’amour, de ces amours qui frôlent la vie et la mort. Entre le réel et la finitude, un monde de travers et de recommencements.

Un livre qu’on relit, pour le simple plaisir et pour l’amour qu’on peut (encore) porter au cinéma. De préférence, sur Grand Écran, parce que la vie paraît encore plus belle.

Mais n’est-ce pas dû à l’écriture du regretté Jean-Loup Dabadie, scénariste « émérite » du cinéma français qui tâte avec aise l’international. Bien que le scénario soit écrit en par Paul Guimard, d’après son propre roman, Dabadie (et Sautet) en font l’adaptation. Travail donc d’équipe, mais le célèbre scénariste et dialoguiste ne rate pas de mettre sa griffe.

Il évoque les références à d’autres auteurs, comme le récemment disparu Jean-Luc Godard (voir hommage ici.) et sa célèbre scène de lit avec Piccoli et Brigitte Bardot dans Le mépris, pour ma part, son meilleur film. Justement, JLG ne voulait pas de la star française, mais elle a fini par illuminer l’écran et s’est avéré une excellent comédienne, comme dans La vérité, de Henri-Georges Clouzot.

À tel point que l’auteur de ce livre inusité en ce qui a trait aux livres de cinéma lui consacre une entrevue prenante, directe, sans recours aux métaphores, quelque temps avant sa disparition.

Un livre qu’on relit, pour le simple plaisir et pour l’amour qu’on peut (encore) porter au cinéma. De préférence, sur Grand Écran, parce que la vie paraît encore plus belle.

Arnaud Corbic
Souviens-toi des choses de la vie
Suivi d’un entretien inédit

avec Jean-Loup Dabadie
Paris : Éditions Séguier, 2022
160 pages
[ Illustré ]
ISBN : 978-2-8404-9910-7
Prix suggéré : 12,99 $US
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